rue Ernest Lepot rue Ernest Lepot  

 

 

Cette rue doit son nom à un philanthrope qui fit de la ville de Cambrai sa légataire universelle à charge pour elle de distribuer chaque année un petit capital à des "Rosières", jeunes filles vertueuses en état de se marier.

On ignore si ce sont la vertu ou les finances qui firent défaut, mais force est de constater que cette pratique a depuis longtemps disparu.

Du legs fait en 1895 par E. Lepot subsistent ses maisons n°9 et 11 qu'il destinait à des vieillards pauvres.

 

La municipalité de cette époque, dans un élan de reconnaissance, n'avait pas hésité à débaptiser l'ancienne rue des Lombards pour lui donner le nom du généreux donateur. C'était certes un geste respectable mais qui dénaturait le caractère historique de ce quartier de la finance où l'on trouvait jadis rassemblées près du Mont de Piété, la rue des Juifs et celle des Lombards où se tenaient autrefois "les Tables de Prêts".

Cette erreur n'échappa pas aux habitants de la rue qui réclamèrent par pétition dès 1897 que lui fut rendu le nom de "Lombards" qu'elle portait depuis des siècles. On comprend aussi qu'à cette période, la Municipalité ne put répondre favorablement à cette requête ce qui aurait alors constitué une offense à la famille Lepot.

Cette objection n'a plus aujourd'hui sa raison d'être du fait qu'un siècle plus tard, rares sont les cambrésiens sachant encore qui était Monsieur Lepot. Alors pourquoi ne pas redonner à la rue son nom ancestral ?

On pourrait d'ailleurs rendre un meilleur hommage à ce généreux donateur en sauvant sa tombe de l'abandon où elle est réduite au cimetière de la porte de Paris.

A son origine la rue des Lombards abritait une population modeste, c'est en vain qu'on y rechercherait de riches hôtels particuliers. Reconstruites presque totalement au cours du XVIIIe siècle, ses maisons ont gardé la belle ordonnance de cette époque, surtout du côté pair.

Toutes élevées sur deux niveaux on admire l'unité qui existe entre elles. Unité créée tant par l'alignement de leurs corniches saillantes que par les lignes horizontales des bandeaux et cordons qui se prolongent d'une façade à l'autre. Cette horizontalité ainsi créée est encore confirmée par la présence d'allèges rectangulaires d'un type d'ailleurs particulier à la rue.

Ce rang est constitué côté pair par les n° 10 à 32. La date 1732 que l'on trouve sur le n° 28, indique sans doute l'époque où fut édifié cet ensemble qui s'achève au n°32. L'immeuble suivant n°34, plus ancien a gardé son pignon à enroulements typique du siècle précédent. Il a été l'objet d'une habile restauration ces dernières années.

Sur le côté impair on retrouve les mêmes soucis d'unité mais les modifications du XIX et XXe siècle, qu'il s'agisse de reconstruction, restaurations, ajout d'un étage supplémentaire nuisent à la beauté de l'ensemble.

C'est le cas des maisons 9 et 11 léguées par E. Lepot. Admirons par contre au n° 15 la belle façade commerciale en bois avec ses pilastres et chapiteaux. Elle fut semble-t-il initiée vers 1920 par les laiteries Catésiennes sous l'enseigne de "la maison d'Eugénie". Merci au propriétaire de l'avoir si bien gardée et restaurée.

Entrons sous le long porche du 17bis qui donne accès à une vaste cour intérieure. Scellée dans un mur à gauche, une pierre à l'inscription usée par le temps nous livre quand même le nom de de Franqueville et une date : 1739. Dans le fond de la cour existait en 1889 une manufacture de toiles et de batistes.

 

Entre les n° 17bis et 19 un petit portail de pierre en plein cintre donne accès à un wareschaix* qui desservait autrefois trois propriétés dont l'arrière d'une maison de l'actuelle rue du petit séminaire.

 

Les n° 19, 19bis et 21 ne formaient primitivement qu'une seule propriété. En 1780 c'était la brasserie Fliniaux devenue en 1820 celle de Queulain-Denimal. Plus tard s'y établit une fabrique d'huile. L'immeuble fut séparé ensuite en 2 parties. Le 19 accueillit la fabrique de tissus Vinchon et Basquin puis Alfred Taquet y créa avant 1900 une mercerie en gros qui restera dans sa famille près d'un siècle.

 

Le n° 21 hébergea pendant plus d'un demi siècle les Contributions Indirectes et servit de dépôt aux Tabacs et Poudres avant de devenir vers 1921 la Maison Duhamel, épicerie gros et détail, dont la belle façade commerciale en bois existe encore et qui, nous l'espérons, sera préservée.

Le bâtiment sur cour, invisible de la rue, est en pierre de taille, c'est dans une de ses dépendances qu'en 1861 le statuaire Eugène Guerlain sculpta le "Batiste" qui orna le jardin public de la ville jusqu'à sa destruction par les bombardements de 1944.

 

D'autres cambrésiens célèbres ont vécu rue des Lombards tels au XVIIIe les imprimeurs Nicolas Douillez, en 1727 et, jusqu'à sa mort, Samuel Berthoud. Plus tard, Charles Leboucq, avocat et député de la Seine au n°28. 

Cette rue a fait l'objet d'une étude dans notre bulletin N°36 de décembre 2005.

 

Wareschaix : ruelle étroite hors de la voie publique donnant issue à plusieurs propriétés

 

Lire le bulletin N° 36 sur la rue Ernest Lepot.